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  • Grand Théâtre
  • Identification

  • Type d'entité
    Collectivité
  • Forme(s) autorisée(s) du nom
    Grand Théâtre
  • Autre(s) forme(s) du nom
    Théâtre de Neuve (1879 - 1910)

  • Description

  • Dates d'existence
    1879
  • Histoire

    Le Grand Théâtre est à la fois un lieu et une institution. En tant que lieu, il s'agit de l'imposant bâtiment construit sur la place Neuve entre 1874 et 1879 et entièrement rénové entre 1951 et 1962, suite à un incendie. Plus vaste plateau de Suisse, parmi les plus grands d'Europe, la scène est dotée d'un équipement technique ultra-moderne en grande partie rénové en 1998. La salle peut accueillir près de 1500 personnes. En tant qu'institution, il s'agit de la plus grande structure actuelle de production et d'accueil de théâtre lyrique de Suisse romande. La dénomination de Grand Théâtre date de 1910, date à laquelle l'institution abandonne le nom de Théâtre de Neuve, sans doute pour se démarquer des quelques six autres théâtres officiant à Genève.

    L'actuel Grand Théâtre a pour lointain ancêtre le premier théâtre permanent en pierres, qui est inauguré en 1783 aux Bastions. Celui-ci avait succédé au premier théâtre installé à Genève en 1766. Sa structure en bois n'avait pas résisté et il fut détruit par les flammes deux ans après son ouverture. Pendant la première moitié du XIXe siècle, le théâtre parlé domine totalement la scène genevoise, les élites conservatrices de retour aux affaires durant la Restauration, proches des milieux calvinistes, goûtant peu aux plaisirs de l'art lyrique. Cependant, cela n'empêche pas l'opéra de pénétrer à Genève, soumise aux influences des autres scènes d'Europe. Ainsi vers 1830, un opéra de Giacomo Meyerbeer (Jakob Meyer Beer, 1791-1864), compositeur berlinois qui connut un immense succès de son vivant, semble enraciner malgré tout l'opéra au théâtre genevois. Pour l'occasion, 80 citoyens se forment en société et donnent 600 000 francs, somme énorme pour l'époque, dans le but notamment de renforcer l'orchestre. Pourtant, les années suivantes, la scène genevoise demeure plutôt médiocre, malgré l'arrivée au pouvoir des radicaux, plus ouverts à l'art lyrique. Parfois, le passage de troupes extérieures permet au théâtre de sortir de cette médiocrité, comme en 1852, lorsque la troupe de l'Opéra de Zurich, autour de laquelle gravite Richard Wagner, réfugié à Zurich suite aux troubles révolutionnaires de 1848 en Allemagne, vient donner une suite de représentations à Genève. C'est également dans ces années-là que Genève découvre l'univers wagnérien. Or, partout en Europe, les opéras du compositeur allemand entraînent des débats passionnés entre adeptes inconditionnels et opposants. Genève ne sera pas en reste. En 1857, on joue "Tannhäuser" pour la première fois. Mais le théâtre dispose de moyens insuffisants pour monter les gigantesques opéras wagnériens : un choeur de seize chanteurs, une troupe d'opéra de sept solistes et un orchestre de trente musiciens sont tout ce qu'il peut offrir, la fosse ne permettant guère de contenir plus de personnes. Malgré l'énorme succès qu'obtient "Tannhäuser" à Genève, Wagner ne sera plus joué les années suivantes. Pendant tout le XIXe siècle, le grand opéra reste marginal à Genève. Le théâtre genevois, oeuvrant dans le giron de l'Opéra-Comique de Paris comme pourvoyeur de nouveautés, considère le répertoire lyrique comme minoritaire.

    Les quelques rénovations subies par le théâtre en 1866, l'installation de l'éclairage au gaz la même année, ne suffisent pas à pallier les insuffisances notoires de la scène, trop petite pour accueillir le grand opéra, notamment les oeuvres de Meyerbeer, compositeur favori du public du XIXe siècle. D'autre part, le théâtre compte, sur les 1100 places disponibles, a peine plus de 900 places assises : les témoignages de l'époque insistent tous sur l'entassement qui règne lors de certaines représentations. Dès 1861, le principe de la construction d'un nouveau théâtre est adopté. Une partie de l'héritage du duc de Brunschwick permet sa réalisation. Le bâtiment s'élèvera sur la place Neuve, entre le Conservatoire et le Musée Rath, sur un terrain de 3000 m2 offert par l'Etat de Genève. Si on en croit le Journal de Genève de l'époque, le nouveau théâtre, de par la taille et l'équipement scénique qu'il propose, prend place au premier rang des théâtres suisses et au dixième rang des théâtres européens. Depuis la fin des années 1850, un certain nombre de théâtres prestigieux avaient été inaugurés en Europe (la Monnaie en 1856 à Bruxelles; Covent Garden en 1858 à Londres; Vienne en 1869, l'opéra de Bayreuth, entièrement dédié à Wagner en 1875). Le nouveau Théâtre de Neuve s'en inspire. Mais, surtout, le modèle qui servit à la construction du théâtre genevois ne fut ni plus ni moins que le Palais Garnier à Paris, cet Opéra terminé en 1867 et que Napoléon III rêvait comme première scène lyrique du monde.

    L'inauguration officielle du Théâtre de Neuve a lieu le 4 octobre 1879, avec une représentation du "Guillaume Tell" de Rossini, en présence du Conseil fédéral. Les premières années du nouveau théâtre ne voient pourtant pas vraiment le développement du grand opéra. Si le public se détourne quelque peu de l'Opéra-Comique, ce n'est pas tant au profit du grand opéra que de l'opérette (ou opéra-bouffe), développée notamment par Jacques Offenbach (Jacob Offenbach, compositeur allemand né à Cologne en 1819, décédé à Paris en 1880) et Johann Strauss fils (compositeur autrichien, né à Vienne en 1825, décédé dans la même ville en 1899). Les années suivantes, les saisons restent en général médiocres, sauvées parfois par le passage de troupes extérieures. Il faut attendre 1889 pour que le compositeur le plus joué sur la scène viennoise et sur les scènes allemandes, à savoir Richard Wagner, soit à nouveau monté à Genève, avec "Lohengrin". Subissant l'influence de l'opéra parisien qui, face à la violence populaire déchaînée par le souvenir encore trop présent de la guerre franco-prussienne de 1871, ne peut se lancer dans le répertoire wagnérien, le Théâtre de Neuve hésite. Monté en décembre, "Lonhengrin" sauve toute la saison 1889-1890 : on ne parle que de Wagner, cette année-là, à Genève. Des conférences autour de l'oeuvre du compositeur sont organisées, alors que dans la Promenade des Bastions des orchestres jouent aux passants les airs de "Lohengrin". Malgré les faiblesses de la scène genevoise - choeurs souvent pas à la hauteur, orchestre insuffisant - la critique est plutôt bonne et l'opéra wagnérien fait sortir momentanément le théâtre des scènes de second ordre desquelles il ne parvenait pas à s'extraire. En 1894-1895, "Tannhäuser" est à nouveau monté. Cependant, ce second opéra clôture le cycle wagnérien et, les années suivantes, le théâtre est à nouveau en proie à la critique du public, parfois violente et nécessitant l'intervention des forces de l'ordre. L'utilisation de sifflets en pleine représentation, pour montrer son mécontentement, est chose courante. Entre 1900 et 1914, Wagner est peu présenté à Genève alors que partout en Europe, même à Paris, c'est le compositeur le plus joué.

    Mais, malgré les déboires du théâtre, la musique symphonique progresse à Genève. Avant la fin des années 1880 et le regain d'intérêt porté au théâtre grâce à l'opéra wagnérien, le mécénat abandonne le Théâtre de Neuve pour porter son soutien à l'orchestre du théâtre, dirigé depuis la fin des années 1860 par un talentueux Bavarois, du nom de Hugo de Senger. L'orchestre se donne annuellement douze fois en concert. Les années suivantes, l'importance des concerts symphoniques ne cesse de croître et les grands noms viennent mener l'orchestre qui se produit soit au Victoria Hall, soit au Grand Théâtre. Durant la Première Guerre mondiale, Albert Paychère fonde la Société de musique symphonique, qui monte périodiquement des opéras dans la salle du Théâtre de la Comédie. Pour la danse, la Société bénéficie des danseuses de l'Institut Jaques-Dalcroze, l'inventeur genevois de la rythmique, et pour la musique de l'Orchestre de la Suisse romande, fondé en 1918 par le Vaudois Ernest Ansermet. La Société de musique symphonique monte parfois des opéras au Grand Théâtre, dont les saisons demeurent inégales, celui-ci étant toujours tourné en direction de Paris. Alors qu'ailleurs en Europe, le public découvre les opéras de Richard Strauss et le répertoire russe, rien de tel à Genève.

    La crise financière du début des années 1930 manque de provoquer la fermeture des portes du Grand Théâtre. La Ville remet l'exploitation du théâtre à une organisation subventionnée. Dès la saison 1934-35, c'est la Société romande des spectacles, organisme semi-officiel, qui organise les spectacles.

    Le 1er mai 1951, lors d'une répétition de la "Walkyrie" de Richard Wagner, un violent incendie se déclare qui détruit la scène, toute la machinerie et les installations mécaniques et électriques. Le Conseil administratif de la Ville de Genève se lance immédiatement dans l'étude d'une reconstruction qui intégrerait les moyens électro-mécaniques les plus modernes de l'époque. Le projet du Conseil administratif, budgétisé à 14 millions de francs est refusé lors d'un référendum populaire en octobre 1953. Ce refus fait traîner les choses. Les études durent jusqu'en 1958, le deuxième projet prévoit un budget à peine moins élevé de 13 millions de francs. Finalement, le coût se monte à 26 millions de francs - à cause notamment de l'inflation - et le Grand Théâtre reconstruit est inauguré le 10 décembre 1962. Les années suivantes, la scène de la place Neuve se hisse au rang des meilleures scènes lyriques européennes, alors que, depuis la fin des années 1990, certains opéras du Grand Théâtre sont montés dans le Bâtiment des Forces motrices (BFM), rénové et aménagé en scène de théâtre pour accueillir la saison du Grand Théâtre lors de la rénovation de celui-ci en 1998.

  • Zones géographiques
    Genève (Suisse)
  • Statut juridique
    Fondation de droit public (Fondation d'intérêt communal public, selon l'art.67, lettre h, de la Loi sur l'administration des communes du 3 juillet 1954)
  • Fonctions et activités

    La fonction actuelle du Grand Théâtre est d'organiser des spectacles d'art lyrique, chorégraphique, des récitals, des concerts et, occasionnellement, des pièces de théâtre.

    Depuis la fondation du premier théâtre de Genève en 1766, sa fonction n'a guère changé, hormis la diminution du théâtre parlé en faveur du théâtre lyrique. Aujourd'hui, le Grand Théâtre est en effet, plus que jamais, un théâtre d'opéra.

  • Textes de référence

    Statut de la Fondation du Grand Théâtre de Genève, 1er décembre 1959

    Loi relative à la création d'une "Fondation du Grand Théâtre de Genève", 29 avril 1960

    Loi modifiant la loi relative à la création d'une "Fondation du Grand Théâtre de Genève", 20 novembre 1964

    Convention relative à l'exploitation du Grand Théâtre de Genève, entre la Ville de Genève et la Fondation du Grand Théâtre de Genève, 3 avril 1963

  • Organisation interne

    Actuellement, la subvention accordée à la fondation du Grand Théâtre est inscrite au budget de la Division art et culture du Département municipal des affaires culturelles.

    Au XIXe siècle, le théâtre apparaît comme un poste de dépense isolé dans le budget. Bon an, mal an, la dépense municipale consentie pour le théâtre oscille entre 2 et 3% des dépenses municipales globales. Au début des années 1880, au moment de l'inauguration du nouveau Théâtre de Neuve, cette proportion se monte à 7% avant de redescendre et de se stabiliser aux alentours de 2% des dépenses municipales annuelles. La crise des années 1930 voit même la proportion fondre, dès 1932 et jusqu'au deuxième conflit mondial, à moins de 1% des dépenses globales.

    En 1936, le Grand Théâtre est intégré au sein du Service des spectacles et concerts (comprenant également le Victoria Hall et le Kursaal). Il forme la principale institution de ce service, monopolisant entre 47 et 62% du budget du service, suivant les années. Mais dans le budget municipal global, les dépenses consenties en faveur du Grand Théâtre demeurent stables au fil des ans. Constituant un peu plus de 1% du budget en 1950, elles se fixent aux alentours de 3% à partir de 1960 - soit la même proportion que durant tout le XIXe siècle - , grimpent momentanément au-delà de 4% dans les années 1980 et 1990, pour redescendre à 3% en 2004, au moment où, soumis à une crise financière, le Grand Théâtre envisage la suppression du Ballet.

    Pour ce qui est de l'organisation interne, il faut distinguer deux niveaux. Le premier niveau concerne l'exploitation du Grand Théâtre, puisque la Municipalité ne le fait pas elle-même de façon directe. Le second niveau concerne le fonctionnement de l'institution.

    Actuellement, l'exploitation du Grand Théâtre est assurée, depuis sa réouverture en 1962, par la Fondation du Grand Théâtre, fondation d'intérêt public communal. Les organes de la Fondation sont le Conseil de fondation, composé de 14 membres désignés par le Conseil municipal et le Conseil administratif de la Ville de Genève, et le Bureau de la fondation qui compte, lui, 5 membres issus du Conseil de fondation, dont deux membres du Conseil administratif (le conseiller administratif en charge de la culture et le conseiller administratif en charge des finances). La Fondation reçoit une subvention de la Ville pour exploiter le Grand Théâtre et se charge de trouver des fonds extérieurs. Jusqu'en 1964, la Fondation a non seulement la charge de l'exploitation du Grand Théâtre, mais aussi de son administration : c'est à elle qu'incombe de payer les collaborateurs du Grand Théâtre. Depuis 1964, en revanche, la plus grande partie des collaborateurs du Grand Théâtre sont payés par la Ville et soumis au statut du personnel de l'administration municipale. Cependant, les membres de la direction générale du Grand Théâtre et le personnel artistique de scène sont engagés en vertu d'un contrat de droit privé.

    Auparavant, jusque dans les années qui suivent la Première Guerre mondiale, le théâtre a été exploité directement par la Ville. En règle générale, le Conseil administratif se réservait un certain nombre de pouvoirs en matière artistique, et c'est au délégué du Conseil administratif que, par exemple, les spectateurs rendus furieux par les mauvaises prestations du théâtre s'en prenaient régulièrement.

    Les difficultés financières des années 1930 provoquent un changement. Le Conseil administratif décide de remettre l'exploitation du Grand Théâtre à un organisme qu'il subventionnera. La Société romande des spectacles, organisme semi-officiel créé en 1935 et qui exploitera le Grand Théâtre jusqu'à l'incendie de 1951, est en ce sens l'ancêtre de l'actuelle Fondation du Grand Théâtre.

    Au niveau du fonctionnement à proprement parler de l'institution, l'administration au sens large du Grand Théâtre est composée de la Direction (un directeur général et 5 collaborateurs), des Services administratifs (11 collaborateurs) et de la Billeterie (14 personnes) de laquelle dépendent les finances.

    Les Services artistiques sont composés du Ballet (8 collaborateurs sans les danseurs) et du Choeur (4 collaborateur sans les chanteurs).

    Les Services techniques sont composés de 11 collaborateurs administratifs, d'électriciens (20), d'habilleuses (6), de machinistes (29), de spécialistes son/vidéo (11), des ateliers (12), des peintres/décorateurs (9), des tapissiers-décorateurs (13), des couturières (14), des huissiers (6) et du personnel d'accueil (50). En tout, le Grand Théâtre occupe plus de 220 collaborateurs, sans compter les artistes de scène.

    S'il dispose d'un Choeur et d'un Ballet permanents, le Grand Théâtre n'a pas d'Orchestre, mais bénéficie des prestations de l'Orchestre de la Suisse romande (OSR). Lors des tournées de l'OSR, tous les deux ans, c'est l'Orchestre de Chambre de Lausanne qui assure les représentations.

    Au moment de la création de la Municipalité en 1842, le théâtre occupe seulement deux personnes, soit le directeur et le concierge-machiniste. Les années suivantes, une dépense est également consentie pour l'orchestre, les costumes, l'acquisition des droits d'auteur et des partitions, et les décors, qui consistent en de gigantesques toiles peintes, souvent réutilisables. L'orchestre (Orchestre de la Ville de Genève) devient permanent dès 1875, ainsi que le Choeur. Le Ballet connaît une succession de fondations et de suppressions. Il est définitivement supprimé en 1907, avant d'être à nouveau recréé en 1962. Quant à la troupe, elle est formée en début de saison et soumise à une sorte de "référendum" du public : ce n'est qu'en 1878 que l'on forme une commission consultative, chargée de sélectionner la troupe. La troupe est payée grâce aux recettes de quelques représentations qui lui sont octroyées. Elle est supprimée dans les année 1930, au moment où la Ville remet l'exploitation du Grand Théâtre à un organisme subventionné.


  • Contrôle de la description

  • Code d'identification
    CH.AVG.GTISAAR
  • Code d'identification du service
    CH-001140-3 Archives de la Ville de Genève
  • Règles et conventions
    Notice établie conformément à la norme internationale sur les notices d’autorité utilisées pour les archives relatives aux collectivités, aux personnes ou aux familles (2e édition, 2004) (ISAAR(CPF))
    Forme autorisée du nom établie par les Archives de la Ville (AVG)
  • Date de création, de révision ou de destruction
    Décembre 2005. Création : Gérard Duc
  • Langue et écriture
    Français (Suisse)
  • Sources
    Marcel Imsand, Roland Aeschlimann, Jean-Jacques Favre, "Le Grand Théâtre de Genève: reflets d'aujourd'hui : 1879-1979", Genève, 1979.
    Roger de Candolle, "Histoire du Théâtre de Genève", Genève, 1978.
    François Abbé-Decarroux, "Le rôle économique du Grand Théâtre de Genève", Genève, 1989.
    Comptes-rendus financiers de la Ville de Genève, 1842-2004.

  • Ressource(s) documentaire(s)

  • Ressource documentaire 1
    Grand-Théâtre
  • Cote
    CH AVG GT
  • Type de ressource associée

    Fonds d'archives

  • Nature de la relation
    Producteur
  • Dates des ressources associées
    1894-2001